Jean 21,1-19

La seconde pêche miraculeuse structure les relations dans l’Église

Évangile du dimanche 4 mai

Avec le récit de la seconde pêche miraculeuse, l’évangile de Jean nous renseigne sur l’organisation très structurée que Jésus a voulu donner à son Église ; sur les missions qu’Il lui a assignées à l’intérieur comme à l’extérieur d’Israël, et surtout sur le rôle prépondérant qu’Il a voulu réserver à Pierre.

Données introductives sur Jean 21,1-19

L'Évangile de Jésus Christ selon Saint Jean
chapitre 21, versets 1 à 19

Note de traduction : pour des questions de droits d’auteur qui nous empêchent de publier le texte commun, nous vous proposons ici une traduction de l'Évangile depuis la Vulgate latine et la Peshitta araméenne. Bien qu'imparfaite, notre traduction cherche à favoriser la conservation du contexte de ces deux traditions ecclésiales. La pertinence de cette page tient davantage au commentaire proposé à sa suite.

1. Après cela^[1] Jésus Lui-même se manifesta à nouveau à ses disciples à l’entrée du Lac^[2] de Tibériade et il se manifesta de la façon suivante :
2. furent réunis là, ensemble, Simon-Pierre, celui que l’on surnommait Thomas-le-Jumeau, Nathanaël de Cana en Galilée^[3], les fils de Zébédée et deux autres de Ses disciples.
3. Simon-Pierre leur dit : « Moi, je vais pêcher du poisson au filet. » Ils lui dirent : « Nous aussi, nous venons avec toi » et ils sortirent et ils montèrent dans le bateau mais cette nuit là ils ne pêchèrent rien au filet.
4. Alors qu’était venu le matin, Jésus se tint ressuscité au bord du Lac et les disciples n’avaient pas reconnu que c’était Jésus.
5. Et Jésus leur dit : « Les jeunes ! avez-vous quelque chose à manger ? » Ils lui répondirent : « Non. ».
6. Il leur dit : « Lancez votre filet du côté droit du bateau et vous pourrez en trouver. » Et ils le lancèrent et ils ne purent pas relever le filet à cause de la multitude de poissons qui s’y était prise.
7. Et le disciple bien-aimé^[4] se mit à dire : « C’est Jésus » et à Pierre « C’est Notre Seigneur » alors quand Simon^[5] entendit que c’était Notre Seigneur il remit sa tunique, car il s’en était dévêtu, et se jeta dans le lac pour aller auprès de Jésus.
8. Alors les autres disciples vinrent dans le bateau car ils étaient peu éloignés de la terre, deux cents brasses, et ils s’efforcèrent de Lui tirer ce filet où étaient les poissons.
9. Alors quand ils montèrent sur la terre ferme ils virent un lit de braises, des poissons puis du pain, posés là.
10. Et Jésus leur dit : « Qu’il y ait aussi des poissons pêchés maintenant. »
11. Et Simon-Pierre remonta et fit tirer à terre le filet surchargé et compta cent cinquante-trois gros poissons. Et malgré ces opérations le filet ne se déchira pas.
12. Jésus leur dit : « Venez, faites la fin de votre jeûne.^[6] » Alors aucun parmi les disciples n’osa parler pour dire : « Qui êtes-vous ? » parce qu’ils savent qu’Il est "Notre Seigneur".
13. Alors Jésus s’approcha et leur fit le don d’un pain et d’un poisson.
14. Ce fut le troisième moment où Jésus se rendit visible à ses disciples après qu’Il se fut ressuscité en revenant de la "Maison des morts".
15. Au moment où ils eurent fini de manger, Jésus dit à Simon-Pierre :
    « Simon fils de Jonas, m’aimes-tu viscéralement^[7] plus que toutes ces choses ? »
    Il lui dit : « Oui Mon Seigneur, Toi Tu sais que moi je T’aime viscéralement. »
    Il lui dit : « Sois pour Moi le Berger de mes agneaux. »
16. Il lui dit à nouveau, une seconde fois :
    « Simon, fils de Jonas m’aimes-tu viscéralement ? »
    Il lui dit : « Oui mon Seigneur, Toi tu sais que je t’aime viscéralement. »
    Il lui dit : « Sois pour Moi le berger de mes béliers. »
17. Il lui dit une troisième fois « Simon fils de Jonas m’aimes-tu viscéralement ? » et Pierre fut attristé parce qu’Il lui avait redit une troisième fois « m’aimes-tu viscéralement ? » et il Lui dit : « Mon Seigneur, tu connais profondément tout de moi en actes et en paroles et tu sais que moi je t’aime viscéralement. »
    Jésus lui dit « Sois le berger de mes brebis portantes.
18. Amen Amen Moi je te dis que lorsque tu étais adolescent selon tes relations aux autres, tu mettais ta ceinture et allais où tu le voulais, mais quant tu seras devenu impotent tu auras à étendre tes mains et un autre te nouera ta ceinture autour de tes reins et te conduira impotent où tu ne voudrais pas. »
19. Mais Il disait cela pour indiquer par quelle mort il glorifierait Dieu. Et quand Il eut dit cela, Il lui dit : « Viens à Ma suite. »

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Commentaire et contexte de cet Évangile

D’une pêche à l’autre

La seconde pêche miraculeuse a eu lieu après la Résurrection, et ainsi elle s’inscrit dans le parcours de remémoration que les disciples ont effectué en Galilée, sur la recommandation que Jésus Lui-même leur avait faite.

Ce déplacement s’est opéré selon une pratique très classique dans les sociétés de tradition orale. À chaque étape d’un long périple qui les a amenés jusqu’au nord du lac de Tibériade, ils se sont appuyés sur l’observation des paysages pour se remémorer avec précision les actes et les enseignements de leur Maître et pour reconstituer une chronologie des faits aussi fidèle que possible.

De Jérusalem, ils sont d’abord descendus vers Bethléem, puis ils ont remonté le Jourdain jusqu’au gué de Béthabara, où ils ont fait mémoire du Baptême de Jésus et de l’appel des premiers disciples. Après quoi ils ont continué leur route vers le lac, dont ils ont longé la côte jusqu’à arriver à ce qu’on appelle « le jardin du roi » ; en araméen « Guénnésar ». C’est l’endroit même où la première pêche miraculeuse avait eu lieu ; celle dont seulement un petit nombre avait été témoin. Il y avait alors Jacques et Jean, les fils de Zébédée, et par ailleurs Simon qui – significativement - avait prêté sa barque et l’avait poussée vers le large avec l’aide de son frère André.
Ombragé par de grands arbres et irrigué par les eaux de sept petites rivières, le site a des airs de paradis terrestre. En outre, il comporte quantité de grottes utilisées pour la formation et aussi propices à ces « retraites mystiques^[1] » que Jésus exigera de ses disciples.

153 poissons

Pour ceux qui l’ont effectué, ce périple a donc été l’occasion de faire mémoire des Paroles et des Actes de Jésus ; et d’en cristalliser le souvenir dans quantité de « perles » qui ont permis de former les 17 colliers thématiques dont la première Église a fait l’outil pédagogique de sa catéchèse.

C’est à ces colliers que font allusion les 153 poissons que les apôtres ont remontés dans leurs filets. Ce nombre dont la précision peut sembler un peu mystérieuse, a en fait une signification symbolique très précise. Il correspond à ce qu’on appelle la « gloire de 17 ». On l’obtient très simplement en additionnant successivement et dans l’ordre les 17 premiers nombres.

C’est une manière analogique pour évoquer, d’une part le nombre des convertis qui va bientôt s’accroître très rapidement, et d’autre part, la sagesse contenue dans les évangiles. Le nombre 153 signifie en somme que les 17 colliers qui forment le trésor mémoriel de l’Église (et dont 40 ans de recherches ont permis de reconstituer la savante complexité), sont à eux seuls porteurs d’un contenu inépuisable qui correspond à la totalité de la Révélation. Il suffira désormais de mettre en route son intelligence méditative pour accueillir les Mystères du Royaume de Dieu ; sans avoir besoin de chercher quoi que ce soit en dehors !!!

Organisation de l’Église et Mission de Pierre

Ce parcours a aussi permis aux disciples de prendre conscience de l’organisation très concrète et de la forte structure hiérarchique que Jésus a Lui-même mises en place pour son Église. Il l’a fait en instituant successivement les 12, les 72 et les 500 ; autant de « cadres » entre lesquels les rôles ont dû être strictement répartis et hiérarchisés. Les évêques, les prêtres et les diacres devant exercer des fonctions bien distinctes, qui à la fois se subordonnent et se complémentent les unes les autres.

C’est ce que Jésus signifie très clairement lorsqu’Il répond aux trois professions d’amour que Pierre Lui adresse. Quand Il dit :

1. « Sois le berger de mes agneaux », il faut comprendre que ces agneaux sont les simples fidèles qui viennent tout juste de naître à la vie de l’Esprit. Et que leurs bergers sont leurs parents puis les diacres qui ont la responsabilité d’accompagner leurs premiers pas dans la foi.
2. « Sois le pasteur de mes béliers^[2] », il faut comprendre que le prêtre est le pasteur qui doit veiller sur la foi de ses brebis ; c’est-à-dire de ces diacres qui ont eux-mêmes reçu la responsabilité d’accompagner les fidèles dans leur démarche de foi.
3. « Soit le berger de mes brebis portantes », Il faut comprendre que ce berger exercera une charge paternelle vis-à-vis des prêtres, des diacres et de tous les consacrés.

Le ministère de Pierre et celui de Jean

Le rôle de Pierre sera d’organiser les missions de l’Église ; non seulement en direction de la diaspora d’Israël, mais vers toutes les nations de la Terre, et particulièrement vers les empires les plus peuplés de son époque. Mais en même temps qu’il ira lui-même convertir les Romains, il enverra Jacques en Espagne où l’attendra l’hostilité des plus hautes autorités de son temps. Quant à Thomas il prendra le chemin de l’Inde pour aller ensuite (comme on le sait maintenant) jusqu’en Chine et c’est à la demande de l’Empereur lui-même qu’il y annoncera la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.

L’autorité de Pierre s’étendra ainsi sur toute la vie de l’Église : sur son administration comme sur son enseignement. Sans pour autant devenir exclusive d’une autre autorité qui est loin de lui être inférieure : celle que Jésus a confiée à Jean, le disciple "bien-aimé", afin qu’il exerce un singulier magistère sur la vie spirituelle et sur l’expérience des grands mystiques de l’Église.

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