La catéchèse des premiers chrétiens :
un trésor pour la nouvelle évangélisation

Luc 9,11-17

Première multiplication : un pain miraculeux pour assimiler la Parole de Dieu

Évangile du dimanche 22 juin

En commentant Jean 6,1-15 nous avons vu le contexte historique de ce miracle : le qoubala de deuil de Jean-Baptiste. Avec ce récit de Luc, nous allons découvrir la singulière anthropologie de la vie mentale[1] qui a permis aux disciples de Jésus d’accueillir le grand mystère de l’Eucharistie.

Données introductives sur Luc 9,11-17

Évangile du dimanche 22 juin 2025 :

Le Saint Sacrement du corps et du sang du Christ - Année C

Synopse de cet évangile :
Niveau d’enseignement : 1er niveau : catéchèse de Jésus aux familles, "dans les maisons" (pour tous)
Collier évangélique : Collier eucharistique (Pain de Vie)

Note : Le découpage liturgique des évangiles ne révèle pas leur composition en damiers et en colliers de perles. Rétablir cette connaissance - qui structure l'enseignement donné par Jésus Lui-même - apporterait richesse et facilité d'assimilation à la catéchèse.
Consulter Les colliers évangéliques (2003) et La mémoire en damiers (2023) et Marie Mère de l’Église (2025).

L'Évangile de Jésus Christ selon Saint Luc
chapitre 9, versets 11 à 17

Note de traduction : pour des questions de droits d’auteur qui nous empêchent de publier le texte commun, nous vous proposons ici une traduction de l'Évangile depuis la Vulgate latine et la Peshitta araméenne. Bien qu'imparfaite, notre traduction cherche à favoriser la conservation du contexte de ces deux traditions ecclésiales. La pertinence de cette page tient davantage au commentaire proposé à sa suite.

  1. [1]Alors les foules l’ayant su, elles se mettent à Le suivre ; et Il les accueille et Il leur fait répéter la manière d’entrer dans le Royaume de Dieu. Et ceux pour qui une guérison était nécessaire furent guéris.
  2. Alors que le jour commençait à décliner ses disciples s’approchèrent et ils Lui dirent : renvoie les foules pour qu’ils aillent dans les villages et hameaux voisins pour se loger et se nourrir car ici, le lieu est désert.
  3. Jésus leur dit : " donnez-leur vous-mêmes à manger ". Alors eux Lui dirent : " Nous n’avons rien de plus que cinq pains et deux poissons, à moins d’aller acheter de la nourriture pour tout ce peuple "[2]
  4. car ils étaient environ cinq mille hommes. Jésus leur dit : " qu’eux s’assoient par rangées de cinquante selon l’usage des festins ".
  5. Et les disciples les ont fait s’asseoir ensemble pour cette collation.
  6. Et, ayant pris les cinq pains et les deux poissons, Il leva les yeux vers le Ciel, dit une bénédiction et les rompit, et les donna à ses disciples pour qu’ils les posent devant les groupes.
  7. Et ils mangèrent tous et furent rassasiés. Et ce qui leur restait fut emporté : douze paniers de morceaux.

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Commentaire et contexte de cet Évangile

Des témoignages chiffrés

Les deux multiplications des pains que Jésus a opérées sont rapportées dans les récits des quatre évangélistes, qui se corroborent et se complètent. Cette unanimité dans le témoignage indique assez l’importance que la première Église a donnée à ces évènements fondateurs ; et aussi le crédit qu’elle a accordé à ceux qui en ont fixé et « traditionné » le souvenir.

Conformément à un usage fréquent dans les cultures de style oral, les cinq textes qui rapportent ces miracles jouent beaucoup sur l’usage de nombres chargés de sens concrets. Une telle pratique permettait de structurer fortement le sens des récitatifs, d’assurer la solidité de leur transmission, mais aussi de donner la clé de leur lecture.

Ainsi les cinq pains et les deux poissons qui y sont mentionnés font-ils allusion à la composition de la torah : avec les cinq livres qui forment le Pentateuque, et les deux livres indépendants que sont « les prophètes » et « les psaumes ».
Notons que dans la seconde multiplication des pains - qui aura lieu six mois plus tard, en février 29 - les pains sont au nombre de sept et une lecture analogique de ce nombre induit une idée d’achèvement dans le temps. En l’occurrence, il exprime la perfection des enseignements contenus dans les Saintes Écritures ; lesquelles contiennent en puissance l’entièreté de la Parole de Dieu et n’en finiront donc jamais de donner des fruits.

Enfin les douze couffins dans lesquels Jésus ordonne qu’on recueille les restes du repas signifient la capacité de son enseignement à nourrir la vie spirituelle, non seulement celle des douze tribus d’Israël (que personnifie les douze apôtres et les douze portes de la Jérusalem céleste) mais encore celle de tous les peuples de l’univers ; pas un mot de la Divine Parole ne devra être perdu ou laissé de côté.

Une mutation dans la mentalité du peuple de la Promesse

Seuls Marc et Matthieu racontent la première et la deuxième multiplication alors que Jean et Luc n’en rapportent qu’une seule. Mais ces derniers le font en revanche dans des textes qui présentent des tonalités un peu différentes et qu’il est particulièrement intéressant de comparer. Cela fait en effet apparaître une différence à travers laquelle se manifeste une évolution significative de la mentalité des croyants ; une mutation propre à affecter en profondeur la vie religieuse du peuple hébreu. En particulier sa manière de considérer sa propre histoire et de célébrer la Parole de Son Dieu.

Un texte de Jean adossé à l’histoire passée d’Israël

À lire le récit de Jean, on sent toute l’importance qu’il accorde à la personne de Jean-Baptiste et au « qoubala de deuil » que Jésus organise afin de célébrer la mort tragique de son cousin. En tant que son plus proche parent, c’est à Lui en effet qu’incombait la charge de préparer cette réception qui devait avoir un caractère privé et familial.

Elle aurait normalement dû se faire dans une stricte intimité, si elle n’avait pas été troublée par l’irruption intempestive d’une foule d’hommes et de femmes venus auprès de Jésus pour se faire guérir de leurs infirmités et avec le secret désir de faire de Lui le nouveau roi d’Israël.

Ce qu’il faut bien voir, c’est qu’en venant trouver Jésus ces fidèles enfants d’Abraham cherchaient en fait à donner à Jean-Baptiste un successeur, dont l’action s’inscrirait dans le droit fil de l’histoire d’Israël ; dans la lignée de ses grands prophètes et dans son alliance avec la Sagesse Divine.

Le regard que Jean porte sur la multiplication des pains, et le récit qu’il en donne, sont en somme cohérents avec les célébrations qui se pratiquaient alors dans les synagogues ; des célébrations dont le rituel se faisait autour de la Parole de Dieu et en conservant le regard obstinément fixé sur le passé d’Israël.

Saint Luc et la perspective de l’Eucharistie

Ce que pointe au contraire le texte de Luc, c’est l’avenir. C’est une célébration qui va être totalement renouvelée par la révélation du Mystère eucharistique ; une révélation que personne d’ailleurs ne pouvait prévoir ; notamment pas Hérode qui ne faisait pas partie du « Peuple de la Promesse » et tremblait à l’idée que Jean-Baptiste revînt à la vie sous les traits de Jésus et ne se remît à le tourmenter.

Le texte que Luc rédige sous la direction attentive de Marie, participe de la mise en place d’une autre dimension de la célébration ; laquelle désormais ne sera plus liée au deuil de Jean-Baptiste et au passé d’Israël mais à la Résurrection de Jésus et à la naissance de son Église.

Manger du pain pour apprendre à « manduquer » la Parole de Dieu

Pour comprendre l’impact qu’ont pu avoir ces miracles sur les contemporains de Jésus, et le rôle qu’ils ont dû jouer dans leur compréhension du mystère eucharistique, il convient de s’armer des travaux que Marcel Jousse a consacrés à la pratique de l’oralité chez les judéo-chrétiens.

On y verra ce que le pain pouvait représenter dans l’imaginaire des Hébreux ; c’est-à-dire dans la culture et dans l’anthropologie d’un peuple qui, plus que tout autre sans doute, a su pousser la pratique de l’oralité à son plus haut niveau de perfection.

Dans cette tradition en effet l’acte de manger et d’assimiler des aliments pour s’en nourrir est ce qui sert de modèle pour se représenter l’activité d’un esprit qui observe la réalité et qui cherche à la connaître, non pas d’une manière abstraite et en passant par le truchement de théories et de concepts, mais en l’incarnant dans sa chair et en la « manduquant » pour se l’assimiler. C’est-à-dire en se livrant à une pratique très familière chez les Hébreux comme dans tous les peuple de tradition orale ; une pratique qui amènera les apôtres à saisir la vérité de cohérence des singulières Paroles de Jésus : « Manger Ma Chair » et « Boire Mon Sang » !!!

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Jean 16,12-15 - Une Parole pour parler de Dieu - Évangile du dimanche 15 juin

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