Luc 13,22-30
La porte étroite : unique chemin pour suivre Jésus
Évangile du dimanche 24 août
par Pierre Perrier, académicien
Ni le zèle des prédicateurs de la Bonne Nouvelle, ni l’héroïsme des martyrs ne sauraient décourager le grand tentateur, celui qui a eu l’outrecuidance de tenter Jésus Lui-même. Contre ces âmes d’élite et toutes consacrées à Dieu, il emploie la plus subtile de toutes ses ruses. Elle consiste à leur inspirer un orgueil mal placé qui les amènera à se glorifier de leur propre foi, si ce n’est de leur propre humilité !
Clin d'œil pour un nouveau regard sur la catéchèse :
Apprendre sans mettre en pratique, accumuler les connaissances et savoir les textes par cœur sans en avoir intériorisé le contenu peut relever d’un comportement maladif. Comme le dit le Talmud : « science n’est pas sagesse. »
Données introductives sur Luc 13,22-30
Évangile du dimanche 24 août 2025 : | 21e dimanche du Temps Ordinaire |
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Complément d'information : | Marie Mère de l’Église pages 302, 379 et 525 |
Niveau d’enseignement : | 1er niveau : catéchèse de Jésus aux familles, "dans les maisons" (pour tous) |
Collier évangélique : | Collier analogique des paraboles |
Note : Le découpage liturgique des évangiles ne révèle pas leur composition en damiers et en colliers de perles. Rétablir cette connaissance - qui structure l'enseignement donné par Jésus Lui-même - apporterait richesse et facilité d'assimilation à la catéchèse. |
L'Évangile de Jésus Christ selon Saint Luc
chapitre 13, versets 22 à 30
Note de traduction : pour des questions de droits d’auteur qui nous empêchent de publier le texte commun, nous vous proposons ici une traduction de l'Évangile depuis la Vulgate latine et la Peshitta araméenne. Bien qu'imparfaite, notre traduction cherche à favoriser la conservation du contexte de ces deux traditions ecclésiales. La pertinence de cette page tient davantage au commentaire proposé à sa suite.
- En ce temps-là, Il transmettait son Enseignement et faisait apprendre les choses importantes[1] en parcourant les villages et les chefs-lieux tandis qu’Il allait à Jérusalem.[2]
- Alors un homme de sa suite L’interrogea : « Seront-ils peu nombreux ceux qui auront les vies ? »[3]
- Jésus leur dit alors : « Efforcez-vous vraiment de réussir votre entrée par la porte étroite. Moi Je vous le dis : en effet beaucoup chercheront à entrer mais ils sont incapables [de s’en donner les moyens].
- Quand le Maître de Maison se sera relevé et aura fermé la porte et que vous vous tiendrez debout à l’extérieur et que vous vous mettrez à frapper à la porte et commencerez à dire : "Mon Seigneur, mon Seigneur, ouvrez-nous !" Il vous répondra en vous disant : "Moi Je ne reconnais plus d’où vous êtes !"
- Alors vous recommencerez en disant : "Nous avons mangé et bu sous Votre Présidence et Vous avez enseigné dans nos rues."[4]
- Et Il vous dira : "Moi Je ne reconnais plus d’où vous êtes ; éloignez-vous de Moi, vous avez trop travaillé dans le mensonge."
- Alors que seront visibles Abraham et Isaac et Jacob et tous les prophètes dans le Royaume de Dieu, vous serez rejetés là où seront pleurs et remords.
- Et il en viendra de l’Orient et de l’Occident et du Nord et du Midi et ils mangeront dans le Royaume de Dieu.
- Et voici qu’il y aura des derniers qui seront devenus premiers et des premiers qui seront devenus derniers. »
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Commentaire et contexte de cet Évangile
« Qui sera sauvé ? »
En montant à Jérusalem, Jésus passe par des villes et par des villages dans lesquels nombre d’habitants se sont refusé à accueillir la prédication des 12 puis des 72, lorsque ceux-ci sont venus pour préparer la visite de leur Maître. Aussi, un de ceux qui L’accompagnent Lui pose-t-il une question qui lui vient tout naturellement à l’esprit et qu’ils sont d’ailleurs tout à fait en droit de se poser : « Seront-ils peu nombreux ceux qui auront les vies ? »
N’est-il pas légitime en effet que les porteurs de la Bonne Nouvelle s’inquiètent un peu du succès de la mission que le Seigneur leur a Lui-Même confiée, et qu’ils éprouvent une certaine déception, en constatant que tout leur zèle à annoncer la Parole de Dieu en a laissé un si grand nombre indifférents ?
À cette très pertinente question, Jésus ne répond pas directement mais Il profite du désarroi qu’Il perçoit chez ceux qui la Lui posent pour en modifier et en approfondir sensiblement le sens ; et pour leur parler de l’exigence morale et de la pureté du cœur qui doivent animer en profondeur la quête spirituelle des croyants ; singulièrement de ceux d’entre eux qui - plus avancés dans la foi - s’emploieront à annoncer l’Évangile. Ils devront en particulier se garder d’une tentation infiniment subtile que le Malin ne manquera pas de leur instiller ; avec cet esprit de richesse, d’orgueil et de possession qui s’attache si facilement aux certitudes de la foi… Notamment chez les docteurs, les scribes et les savants.
L’orgueil spirituel
Ce que cible ici l’enseignement de Jésus, c’est en somme le danger que fait courir au croyant une attitude d’orgueil spirituel ; c’est-à-dire cet esprit de supériorité qui accompagne facilement l’adhésion d’un homme aux certitudes d’une religion ; quand bien même cette religion donnerait l’humilité comme la plus haute et la plus nécessaire de toutes les vertus.
Ceux qui se haussent du col en disant au Seigneur : « Nous avons mangé et bu sous ta présidence… » « Tu as enseigné sur nos places » se méprennent totalement sur la nature des relations que, dans le fond de leur cœur, ils entretiennent avec leur Maître. Et ils tombent tête baissée dans le piège subtil que le Malin leur tend. Ils sont un peu comme cet homme qui croit honorer son hôte en prenant la première place dans le banquet.
Avoir mangé et bu avec Jésus, être devenus Ses familiers, ne donne aucun droit à ceux qui le suivent ; surtout si cette adhésion ne les a pas empêchés de « commettre l’injustice ».
C’est à la vérité une terrible mise en garde que Jésus adresse ainsi à Ses disciples : même le zèle qu’ils mettront à Le servir, même leur foi de prosélyte, voire même leur courage face aux supplices, le diable pourra toujours les utiliser et les retourner contre eux, en instillant dans le tréfonds de leur cœur un subliminal sentiment d’orgueil et d’autosatisfaction qui ne manquera pas d’agir sur leurs âmes à la manière du plus violent des poisons.
La porte étroite
Tous les hommes sont appelés à entrer dans le céleste Royaume de Dieu. Mais c’est un choix que chacun doit faire librement. De même, personne ne saurait sortir du Shéol et avoir part à la Vie éternelle sans accepter de suivre l’enseignement de Jésus et sans obéir à cette injonction qu’Il lance à Ses disciples pour les exhorter à un combat spirituel qui n’ira pas sans sacrifice : « Efforcez-vous vraiment de réussir votre entrée par la porte étroite. »
Cette expression « porte étroite » ne désigne rien d’autre que la vertu d’humilité, et il est intéressant de noter qu’elle est intimement liée aux rituels et à la catéchèse de la première Église ; notamment à ces quoubalé au cours desquels les diacres réunissaient les maisons d’Israël afin de leur faire célébrer cette Parole de Dieu qu’ils avaient mémorisée et appris à proclamer par cœur. Un des deux diacres, surnommé Michel[1], se tenait à l’entrée du lieu du qoubala afin de discerner ceux qui avaient la capacité de recevoir dignement et surtout humblement la Parole de Dieu, de La laisser pénétrer en eux pour se convertir à l’unisson du groupe, franchissant ainsi cette fameuse porte étroite.
Après cette invitation par les diacres, l’étape suivante concerne ceux qui se seront inscrits dans la voie du baptême et ce sera alors au prêtre de décider de leur passage par la porte étroite suivante, celle du baptistère qui permet de participer à la fraction du Pain (la Messe, le qourbana en araméen). On passe ainsi d’un simple qoubala au qourbana.
« La gloire de Son peuple Israël »
Il n’est pas indifférent que cet Évangile consacré aux dégâts que l’orgueil spirituel risque de produire dans le cœur d’un individu, se termine en évoquant aussi l’effet que ce même péché peut provoquer au niveau de tout un peuple. La mise en garde que Jésus adresse individuellement, à chacun de Ses disciples, vaut aussi pour toute la maison d’Israël, laquelle, par son histoire singulière, y était peut-être particulièrement exposée.
Les Juifs n’étaient-ils pas le « Peuple élu », celui que le Très-Haut avait mis à part afin qu’il devienne « une lumière pour éclairer les Nations » ? N’étaient-ils pas chargés du salut de toutes ces nations païennes qui viendront bientôt « de l’Orient et de l’Occident », « du Nord et du Sud » ? de toutes ces nations qui risquaient bien d’être accueillies « dans le sein d’Abraham, avec Moïse et tous les autres prophètes », avant et peut-être à la place des enfants d’Israël, si ceux-ci ne parvenaient pas à déjouer la grande ruse du démon et à se guérir de la tentation de l’orgueil spirituel que le Malin n’a jamais cessé d’inspirer.
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