Jean 6,41-51
Celui qui a foi en Moi a déjà la vie pour l’éternité :
Je suis le Pain pour les vies
Commentaire d’Évangile
L’enseignement que Jean nous transmet dans cet évangile concerne un dogme essentiel de la foi incarnée de l’Eglise : la présence réelle de Jésus dans le pain et dans le vin de la Sainte Eucharistie. C’est une croyance pour le moins étonnante et dont on sait qu’après avoir provoqué l’indignation des Judéens du premier siècle, elle a été pour beaucoup dans le scepticisme des protestants.
Évangile du 11 août 2024 : | 19ème Dimanche du Temps Ordinaire - Année B |
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Synopse de cet Évangile : | Synopses seulement en Jean pas d’équivalences en autres évangiles |
Niveau d’enseignement : | 3ème niveau : Enseignements de Jésus aux apôtres (pour les prêtres) |
Collier évangélique : |
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Note : Le découpage liturgique des évangiles ne révèle pas leur composition en damiers et en colliers de perles ; Rétablir cette connaissance - qui structure l'enseignement donné par Jésus Lui-même - apporterait richesse et facilité d'assimilation à la catéchèse. |
L'Évangile de Jésus Christ selon Saint Jean
chapitre 6, versets 41 à 51
Note de traduction : pour des questions de droits d’auteur qui nous empêchent de publier le texte commun, nous vous proposons ici une traduction de l'Évangile depuis la Vulgate latine et la Peshitta araméenne. Bien qu'imparfaite, notre traduction cherche à favoriser la conservation du contexte de ces deux traditions ecclésiales. La pertinence de cette page tient davantage au commentaire proposé à sa suite.
- Alors les judéens se mirent à protester contre Lui, parce qu’il avait dit : « Je[1] suis là dans l’être de ce pain descendu des cieux »
- Et ils se mirent à dire : « N’êtes-t-il pas ce Jésus, fils de Joseph, dont nous sont connu son père et sa mère ? et comment donc peut-il dire être celui qui descend des cieux ? »[2]
- Jésus leur répondit et leur dit : « ne protestez pas les uns avec les autres
- Il n’y a pas d’homme qui puisse venir auprès de Moi s’il n’est pas attiré par le Père qui M’a envoyé et Moi je le resusciterai au Dernier Jour.
- Car il est écrit dans les prophètes qu’ils recevront tous l’enseignement de Dieu et tous ceux qui entendent ce qui vient du Père, et qui savent en évaluer l’importance spirituelle[3], ils viennent à Moi.
- Il n’y a personne qui peut porter son regard sur Dieu sauf ceux qui viennent de Dieu.
- Amen Amen Moi je vous le dis[4] : celui qui a foi en Moi a déjà la vie pour l’éternité.
- Je[5] suis dans l’être de ce Pain pour les vies[6].
- Vos pères ont mangé la Manne dans le désert et ils sont morts.[7]
- Je suis donc envoyé dans l’être du Pain qui est descendu des cieux pour que celui qui mange son être actif l’ait pour son compte et qu’il ne meure pas[8].
- Moi Je[9] suis le pain vivant qui descend vraiment des cieux. Si un homme se met à manger de ce pain il sera vivant jusqu’à l’Éternité et ce pain vient [est signe] pour cela. Mon Corps est là pour que les hommes s’approchent de Ma Face selon la vie que je suis en train de donner au Monde. »
Commentaire et contexte de cet Évangile
Pour permettre aux croyants d’entrer dans la compréhension d’un aussi profond mystère, Jean procède avec méthode ; en passant par trois étapes bien distinctes. En bon pédagogue il veut en effet rendre conscients des différentes modalités de la vie mentale, les disciples qui vont apprendre sa parole par cœur et la transmettre oralement. Il les initie de cette façon à une démarche de pensée différente de celle qui empêche ses auditeurs de porter leur regard au-delà des réalités terrestres ; et d’entendre une Parole que Dieu Lui-Même leur adresse.
Ces trois étapes permettent de faire le passage entre une pensée simplement analogique - qui joue sur des ressemblances extérieures - et une pensée d’un tout autre ordre, qui rend plausible cette notion singulièrement déroutante que les théologiens appellent la "transsubstantiation".
Une nourriture donnée par Dieu pour la vie terrestre
Jean fait d’abord référence au miracle de la manne dont le goût délicieux a comblé Moïse et les Hébreux au cours de leur traversée du désert. Au moins pour un temps, cette nourriture venue du ciel leur a permis d’échapper à la "première mort", qui est la mort de la chair. Et par analogie, cette manne a pu être reçue par eux comme un véritable "signe", propre à leur révéler la présence de Dieu dans Son acte créateur.
Cette pensée analogique consiste à s’interroger sur les réalités célestes en leur appliquant des modes de pensée inspirés par la considération des réalités terrestres ; procédé qui comporte évidemment le risque d’une confusion entre deux réalités qui appartiennent à des ordres tout à fait différents : la réalité matérielle et la réalité spirituelle.
On remarquera au passage que le mot "manne" vient de l’Hébreu "mannou" qui signifie " qu’est-ce que c’est ? » Cela montre bien qu’au-delà de sa réalité matérielle, cet aliment miraculeusement descendu du ciel est de nature à poser des questions sur son origine, sur sa création et bien sûr sur son Créateur ; autant d’interrogations auxquelles Jésus apporte d’ailleurs une réponse catégorique lorsqu’Il déclare : " Ce n’est pas Moïse qui a donné la manne mais Dieu Lui-Même ".
Une nourriture qui sort des mains de Jésus
Cette phrase ouvre une deuxième étape dans l’enseignement de notre page d’Evangile. Elle fournit en effet une clé de lecture pour deux textes qui sont essentiels à la compréhension du mystère eucharistique. Je veux parler des récits dans lesquels Jean et Matthieu rapportent les deux multiplications des pains.
A se pencher sur ces épisodes on doit en effet être attentif au fait que la manne n’a pas été donnée par Moïse, qui l’a simplement découverte au matin avec les autres Hébreux ; alors que les pains et les poissons ont bien été donnés par Jésus. C’est dans ses mains qu’ils ont été multipliés et qu’ainsi leur création s’est pour ainsi dire poursuivie.
En cette circonstance Jésus a donc joué le rôle qui, dans la phrase précédente, était dévolu à Dieu ; signifiant ainsi très clairement qu’Il était Lui-Même Dieu ; et, dans la communion avec le Père, le Créateur de toutes choses.
Une nourriture qui est Jésus Lui-Même et plus encore...
La troisième étape dans l’enseignement de notre évangile du jour, concerne la nature de ce pain auquel Jésus s’identifie Lui-Même explicitement quand Il déclare :
« Moi je suis le pain vivant qui descend vraiment des cieux. » (Jean 6,51)
L’insistance qu’exprime le mot "vraiment" est évidemment intentionnelle. Elle donne à entendre que, contrairement à la manne, le pain eucharistique ne doit pas être regardé comme un objet simplement symbolique, renvoyant à une réalité qui lui serait différente et se déploierait dans une autre dimension ontologique. Le pain et le vin que le prêtre consacrera sur l’autel seront vraiment et substantiellement le Corps et le Sang de Notre Seigneur ; même si ce sera sous des formes différentes. Ils en seront des "équivalents" ; en prenant ce caractère vivifiant qui en fera pour le croyant une vraie nourriture et un saint viatique propre à l’accompagner tout au long de son pèlerinage vers le ciel ; l’aidant à parcourir ses "trois vies" : sa vie sur terre, sa vie au Shéol et sa vie éternelle.
Par contre, cette formulation (Jn 6,51) ne traduit pas la richesse du texte original araméen : les deux premiers mots ne veulent pas dire "Moi je suis le pain" mais un plus complexe "Moi-nous sommes le pain".
Nous devons avoir conscience de la création à venir (par l’Eucharistie) d’une relation spirituelle entre Dieu et nous. L’hostie est l’extension du Corps du Christ qui nous fait entrer en communion avec Dieu.
La communion, par l’Eucharistie, est un bienfait pour la communauté des croyants. L’Eglise s’approche ainsi davantage de sa finalité : être le Corps du Christ.
Tout homme est constitué à la fois d’une partie vivante "de la terre" et d’une partie vivante "spirituelle" qui est un don du Ciel. L’Eucharistie est une nourriture terrestre[1] et surtout une nourriture divine nous permettant de développer notre spiritualité jusqu’à la vie éternelle.
La multiplication des pains n’était qu’une expérience terrestre pour annoncer l’Eucharistie : si elle a comblé les participants par une très bonne nourriture terrestre, elle ne crée pas la relation directe entre Dieu et le croyant. Les témoignages de ceux qui ont vécu ce miracle nous donnent l’approche pédagogique de Jésus qui nous est donné par ce texte.
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par Pierre Perrier
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